Le marché canadien des voitures électriques a le potentiel de s’agrandir rapidement, mais de gros défis se dressent devant lui.

La pandémie de la COVID-19 a nui de façon importante à l’approvisionnement des concessionnaires du pays et les ventes ne suivent pas les tendances perçues dans d’autres pays, comme ceux de l’Europe ou de l’Asie. Selon des experts du milieu, l’absence de règles imposées aux constructeurs dans certaines provinces limite la croissance de l’industrie.

D’après un rapport de la firme Dunsky publié l’an dernier, les deux tiers des concessionnaires au Canada n’avaient pas de telles voitures. En conséquence, il est difficile de trouver un véhicule écologique à l’extérieur de l’Ontario, de la Colombie-Britannique et du Québec.

La demande se cultive

Le président-directeur général (PDG) de Mobilité électrique Canada (MEC), Daniel Breton, souligne que la demande ailleurs au Canada n’est pas au même niveau que dans ces provinces. Il explique que les fabricants choisissent d’envoyer des véhicules aux endroits où ils auront le plus de chance d’être vendus.

Selon lui, il faut éduquer davantage les consommateurs pour leur montrer les économies qu’ils peuvent réaliser en se procurant un bolide vert.

« Les gens ne calculent pas le coût total de propriété, explique M. Breton. C’est-à-dire qu’ils vont dire « ça me coûte tel montant par mois, donc si je veux acheter un véhicule électrique équivalent ça me coûtera plus cher ». Cependant, ils ignorent le fait que les coûts d’énergie sont moins chers, de même que ceux d’entretien et d’assurance. De plus, la valeur de revente est plus élevée. En calculant le coût total de propriété, souvent les voitures électriques sont égales ou moins chères que celles à essence. »

La survie de l’industrie dépend de l’innovation

Les gouvernements de l’Ontario et du Canada se sont engagés à appuyer un projet de Ford au coût de 295 millions $ chacun pour la construction d’une usine dédiée à la fabrication de voitures électriques à Oakville.

Pour sa part, General Motors a conclu une entente d’un milliard de dollars avec le syndicat Unifor pour refaire son usine à Ingersol, en Ontario, afin d’y produire des voitures électriques.

De tels projets donnent espoir à Daniel Breton. Il croît qu’ils pourraient assurer la pérennité de l’industrie automobile au Canada.

« Il faut avoir une transition, affirme le PDG de MEC. Le Canada est passé du 4e au 12e rang mondial de 2000 à 2020 pour la quantité de véhicules produits. Plus ça va, plus on perd des plumes. […] Ce sont des initiatives comme ça qui feront en sorte qu’il y aura encore un secteur dans 10, 15 ou 20 ans. »

Selon un rapport publié en décembre 2020, Mobilité électrique Canada prévoit qu’environ 559 400 emplois propres seront créés d’ici 2030, dont près de la moitié dans le secteur des transports propres.

De plus, l’organisme avance que « les recettes attendues des ventes de voitures et de camions légers électriques, d’autobus urbains électriques, d’autobus scolaires électriques, de camions électriques, d’infrastructures de recharge et d’électricité pourraient s’élever à plus de 190 milliards $ » si le Canada suit dans les pas de la Californie, de la Colombie-Britannique et du Québec.

Les conservateurs ontariens corrigent le tir

Dans certaines provinces du Canada, il faut avoir une infrastructure qui facilite l’utilisation pour convaincre le public.

L’élimination des rabais sur les véhicules électriques annoncée par le gouvernement de l’Ontario en 2018 a eu un effet sur l’accessibilité de ces voitures. En l’absence d’un incitatif pour encourager les consommateurs à choisir une option écologique, les ventes de nouveaux véhicules ont chuté. D’après Statistique Canada, celles des voitures à zéro émission, soit électriques à batterie et hybrides rechargeables, ont baissé de 33 % et d’environ 64 % respectivement de 2018 à 2019.

La porte-parole du ministère ontarien des Transports, Natasha Tremblay, indique que « l’Ontario a tenu son engagement de mettre fin au programme de plafonnement et d’échange afin de rendre la vie plus abordable pour les familles ontariennes et de réduire les coûts pour les entreprises » et « créer un environnement commercial concurrentiel qui soutiendra le développement de l’infrastructure des véhicules électriques ».

Toutefois, Mme Tremblay réitère que la province s’est engagée « à éliminer les obstacles réglementaires qui empêchent les investisseurs privés de déployer une infrastructure de ravitaillement à faible émission de carbone qui contribuera à accroître l’adoption de véhicules électriques ».

Hydro One, qui appartient partiellement à la province, et Ontario Power Generation ont depuis lancé le projet Ivy Recharge Network, révélé en février 2020 lors du Salon de l’auto de Toronto. D’ici la fin de 2021, le réseau comptera plus de 160 bornes de recharge dans 73 communautés situées à des intervalles d’environ 100 kilomètres à travers l’Ontario.

La coprésidente du projet, Theresa Dekker, indique qu’il reste un peu plus de 130 sites à compléter. Elle ignore pour le moment à quel point les bornes ont été utilisées depuis leur installation.

Le gouvernement du Canada a également créé un programme d’incitatifs à l’achat de véhicules électriques qui doit s’étendre jusqu’en avril 2022.

SOURCE – Chris St-Pierre, Initiative de journalisme local – APF – Ontario

PHOTO (Crédit : Mobilité Électrique Canada) – Daniel Breton, président-directeur général de Mobilité électrique Canada