« Recevoir le Prix Pierre-Bercier, je ne le mérite pas. Je suis certain. Mais c’est un grand honneur que je vais tenir à cœur le restant de mes jours », indique Robert Chauvin, récipiendaire avec son épouse Hélène du septième prix remis par l’Union des cultivateurs franco-ontariens (UCFO). Pierre Bercier a laissé une marque indélébile dans le paysage agricole franco-ontarien notamment en raison de son caractère innovateur, de sa capacité à partager son enthousiasme pour l’agriculture et la langue française ainsi que pour son leadership communautaire. Après son décès, l’UCFO a institué un prix d’excellence en agriculture. 

C’est devant une salle remplie de parents et d’amis, certains venus d’aussi loin que la région d’Ottawa que le couple de Pointe-aux-Roches a été honoré le 25 avril dernier. L’hommage le plus touchant a été rendu par le frère de Robert Chauvin, Paul. Il a relaté, en six étapes importantes, les moments marquants de la vie de son frère dont il dira : « À mon avis, et même si c’est mon frère, il a été un des grands chefs de la région dans le domaine agricole ». Les Chauvin sont installés sur la ferme familiale depuis six générations puisque le fils de Robert et Hélène Chauvin, Maurice, a décidé de prendre la relève. Cependant, et comme le soulignait Paul Chauvin dans sa présentation, il s’en est fallu de peu que Robert Chauvin devienne Robert Lamontagne. 

« Le premier grand tournant dans la vie de mon frère a été le décès de notre mère. À cette époque, nous n’étions pas riches mais, à la ferme, nous avions tout le nécessaire. Au départ de notre mère, Robert était un bébé et moi, à 6 ans, j’étais l’aîné. Normalement, dans ces cas-là, on dispersait les enfants mais ma grand-mère a dit à mon père de ne jamais séparer sa famille parce qu’il le regretterait toujours. C’est donc elle qui nous a élevés, malgré son âge avancé. »

Deuxième tournant : après une année au collège classique, Robert Chauvin décide d’aller faire des études en agriculture à Alfred, un choix « qu’il portait en lui » selon son frère Paul. Il reprend la ferme familiale et, au fil des ans, Robert fera toutes les cultures de son époque : betteraves, maïs, soya et, finalement, grandes cultures. Entretemps, il rencontre Hélène au Séminaire de London et bientôt ils se marient. Hélène abandonne l’enseignement pour se consacrer à la ferme et aux enfants qui arrivent au fil des ans. « Quand on est jeune et en amour, on ne voit plus clair. Je ne savais pas dans quoi je m’embarquais », souligne-t-elle avec un grand sourire dans la vidéo hommage présentée lors de la soirée, avant de conclure qu’ils sont « toujours en amour ».

Au chapitre communautaire, Robert Chauvin a longtemps siégé au conseil d’administration de la Caisse populaire de Pointe-aux-Roches sans oublier ses 15 années de service à la Coopérative de Pointe-aux-Roches (maintenant Agris), le Ontario Farm Tax Appeal Board et l’UCFO. 

« Mon père disait toujours que pour préserver le français, il faut s’en servir, raconte-t-il. C’est pourquoi j’ai toujours rempli les rapports en français, ce qui ne faisait pas toujours l’affaire des comptables, par exemple. Avec le temps, ils ont compris et ont engagé des finissants francophones pour venir présenter les résultats financiers lors des assemblées. » La Ferme Chauvin Farm restera donc dans la famille et, qui sait, peut-être que Maurice verra un de ses enfants prendre la relève pour une septième génération.

Photo : De gauche à droite : Marc Laflèche, président de l’Union des cultivateurs franco-ontariens (UCFO), Hélène Chauvin, André Chabot, co-récipiendaire du prix en 2009, Robert Chauvin et Rachelle Chabot