Février, c’est aussi le Mois de l’histoire des Noirs et, à Windsor, cette histoire est particulièrement riche. Si l’aventure du « chemin de fer clandestin » est bien connue, par contre, seulement les plus vieux se souviennent des grandes manifestations qui, pendant près de 40 ans, réunissaient les communautés de Détroit et de Windsor au Jackson Park. Certains se remémorent encore la visite de Martin Luther King ou celle de Stevie Wonder dans la Ville de l’auto. Tout cela avait débuté bien longtemps avant.
En 1833, les Britanniques abolissent l’esclavage faisant du futur Canada, où la loi sera entérinée en 1834, une terre d’accueil naturelle pour les esclaves noirs américains. Dès le début de la colonisation, les Noirs avaient été déménagés en Amérique par les Français, les Britanniques et les Hollandais. Après 1833, les Noirs qui arrivent au pays le font volontairement. Certains, loyaux à la Couronne britannique, fuient la Révolution américaine. Pour un grand nombre (environ 40 000), c’est pour conquérir leur liberté qu’ils utilisent le chemin de fer clandestin qui les mène, pour plusieurs, directement à Windsor.
Au XXe siècle, c’est l’immigration en provenance de l’Afrique et des Caraïbes qui permettra d’augmenter la population noire au pays. Pour cette dernière cependant, il faudra attendre l’abolition, en 1962, de lois promulguées sous Wilfrid Laurier en 1911, qui interdisait l’immigration en provenance de pays à majorité noire. De fait, à l’époque, Windsor – et surtout le secteur de Sandwich – avait une véritable communauté noire.
Dans une courte vidéo sur YouTube, Paul Martin, ancien premier ministre canadien originaire de Windsor, se rappelle qu’il n’était pas possible, dans sa jeunesse, de vivre à Windsor sans avoir des amis dans cette communauté. Il se rappelle même avoir participé à des marches pour l’émancipation des Noirs à Détroit et d’y avoir été encouragé par son père. De fait, la lutte pour les droits des Noirs qui se déroulait en grande partie à Détroit était suivie de près par les résidents de Windsor. Malheureusement, à l’époque, il n’y avait pas que les idées qui pouvaient traverser la frontière. Le festival Emancipation Day se déroulait annuellement depuis 1938. L’événement attirait jusqu’à 50 000 personnes et plusieurs invités de marque s’y sont présentés au fil des ans. Cependant, les émeutes raciales de 1966-67 ont fait craindre de sérieux désordres de ce côté-ci de la frontière à l’occasion de l’Emancipation Day et c’est pourquoi le grand rassemblement festif a été annulé à partir de 1967.