Voilà 35 ans que la Loi sur les services en français de l’Ontario s’applique dans la province et demeure, sinon inchangée, tout du moins peu modernisée. Pourtant cet enjeu ne cesse de cristalliser les frustrations et les revendications des Franco-Ontariens.

Dès lors, la récente annonce de Caroline Mulroney, ministre des Affaires francophones, qui laisse à entendre un plan d’action économique plébiscitant une augmentation de la main-d’œuvre francophone, suscite de nombreux espoirs.

Incluse dans l’énoncé économique du gouvernement Ford présenté le 4 novembre, la nouvelle mouture du projet de loi déposé à l’Assemblée législative garantirait le « droit à l’offre active, en d’autres mots les ministères et les organismes désignés devront non seulement faire la promotion de leurs services en français, mais également prendre des mesures concrètes pour s’assurer que leur clientèle de langue française les utilise.

Cela aura un impact majeur sur la manière dont les francophones de la province pourront interagir avec leur gouvernement », a précisé la ministre.

L’évolution législative ainsi envisagée est d’autant plus symbolique que l’énoncé économique de 2018 avait provoqué une véritable crise linguistique dans la province, avec notamment l’abolition du Commissariat aux services en français et de l’Université de l’Ontario français, avant que, sous la pression populaire et le recours aux tribunaux, ces entités ne voient finalement le jour.

Mme Mulroney reconnaît qu’il a « fallu convaincre et rassurer sur le bien-fondé de cette réforme, elle qui avait dû à l’époque défendre les compressions votées par son gouvernement dans les services en français ».

La nouvelle loi, souligne la ministre, va « donner de nouveaux pouvoirs à la province pour qu’elle puisse ajouter des points de service gouvernementaux en français n’importe où, y compris à l’extérieur des zones désignées ».

Rappelons qu’une région désignée est une aire géographique, région ou ville, où les francophones représentent au moins 10 % de la population ou qui compterait au moins 5000 francophones. À ce jour, l’Ontario compte 26 régions désignées.

Cette montée en puissance des services en français ne pourra se faire en ne partant de rien, un temps nécessaire de formation et de recrutement d’une main-d’œuvre francophone qualifiée devra être anticipé dans les domaines les plus en demande tels que l’éducation, la santé, la culture et la petite enfance.

Autre source de satisfaction pour les francophones, il est prévu au sein du projet de loi la traduction des règlements gouvernementaux et la rédaction de nouvelles normes afin d’indiquer clairement comment, quand et où les services en français devront être offerts.

À cet effet, la commissaire aux services en français rattachée au Bureau de l’ombudsman, Kelly Burke, aura à charge d’identifier, d’analyser et de prioriser les actions à mener en la matière.

Seuls bémols à cette transition historique, deux motions portées par l’Assemblée de la francophonie et diverses associations ou membres de la communauté ont été écartées du projet de loi : la généralisation de l’Ontario en tant que région désignée et un Commissariat aux services en français pleinement indépendant.

Au final, le projet de nouvelle Loi sur les services en français de l’Ontario s’inscrit dans la dynamique de reconnaissance nationale du déclin du français au Canada. Conscient de cette réalité, le gouvernement Trudeau s’est également engagé à adopter un projet de loi visant à repenser la Loi sur les langues officielltgjnhmes, à l’instar du gouvernement du Québec qui travaille activement à la réforme de sa Charte de la langue française.

SOURCE – Stéphane Lucky

PHOTO – Caroline Mulroney, ministre des Affaires francophones