L’ambiance était au recueillement au Freed Orman Centre le samedi 22 avril alors qu’une centaine de personnes s’étaient réunies pour commémorer le 23e anniversaire du génocide rwandais.
L’histoire du XXe siècle est particulièrement remplie de massacres de masse en Arménie, au Vietnam, au Cambodge, en Allemagne nazie et en Chine par exemple.
Cependant, comme le soulignait le pasteur Alex Golovenko, la différence entre ces génocides et celui qui a frappé la communauté tutsie en 1994 est qu’il s’est déroulé sur une période très courte, une centaine de jours. Entre la première et la dernière journée, un million de personnes avaient été massacrées, soit près de 75 % de la population.
Date clé du génocide, le 6 avril 1994 au soir, l’avion du président hutu Juvénal Habyarimanana de retour de négociations à Arusha (Tanzanie) avec la rébellion majoritairement tutsie du Front patriotique rwandais, commandée par Paul Kagame, est abattue au-dessus de Kigali. Cet événement offre aux extrémistes hutus la justification du déclenchement du génocide des Tutsis.
Dans sa présentation, le pasteur a invité les membres de la communauté à s’inscrire dans une démarche de pardon plutôt que de nourrir un ressentiment qui, à la longue, va les détruire.
« Lorsque l’on entretient du ressentiment, on se condamne à revivre les événements qui nous ont blessés. On est donc à nouveau victime de celui ou ceux qui ont bouleversé notre vie. Un pardon réel, qui n’exclut pas le devoir de mémoire permet, au contraire, de prendre sa vie en main et d’aller de l’avant. »
Par la suite, différents orateurs ont évoqué des moments tragiques de cette période allant du 6 avril au 4 juillet. Les enfants d’une famille massacrés sur le parvis d’une église où on leur avait garanti la sécurité et un des plus jeunes qui parvient à s’en sortir en déclarant qu’il ne sera plus jamais tutsi ou encore la transformation du stade Amahoro en camp de réfugiés en plein cœur de Kigali.
Pendant ce temps, dans la salle, les gens sont silencieux, attentifs aux paroles des conférenciers dont le Dr Christopher Waters, doyen de la Faculté de droit de l’Université de Windsor. D’entrée de jeu, il ajoute un événement très local à la longue liste des actes contre l’humanité. « Ici même, avant l’arrivée des Européens, trois tribus amérindiennes qui étaient installées sur le territoire depuis des siècles ont été brutalement évincées par des nouveaux arrivants qui leur ont pris leurs terres », rappelant à toutes les participants qu’on ne peut jamais prévoir le tour que prendra l’histoire.

Photo : vingt-trois bougies ont été allumées à la mémoire de proches décédés lors du génocide.