Le 21 avril dernier, une quarantaine de personnes ont assisté à une performance unique, présentée en français de surcroît. Au programme, la création d’une œuvre picturale réalisée par deux peintres – Étienne Yver et Nadine Marais – accompagnée par la lecture de poèmes et d’un duo de cordes (violon et violoncelle). Le tout se déroulait au Sho, Art, Spirit and Performance Art Centre dans le vieux Walkerville, à un jet de pierre de la distillerie fondée par Hiram Walker au XIXe siècle. 

Sans surprise, l’édifice qui abrite le centre avait, à l’origine, une vocation de cette nature. L’intérieur, qui a vraisemblablement servi d’entrepôt dans ses beaux jours, peut prendre différentes configurations. Ce soir-là, il était aménagé en mini-théâtre avec une scène tournante. 

« Ça nous a posé un défi au moment de l’installation des œuvres d’art, mais, finalement, nous avons décidé d’utiliser les murs du décor comme lieu d’accrochage, souligne Étienne Yver, peintre originaire de France. Ce n’est pas ma première visite dans la région de Windsor, poursuit-il. Il y a quelques années j’ai même pu profiter d’un séjour en résidence à Détroit. Windsor, c’est merveilleux. »

La performance intitulée Le Printemps d’Yver est en fait un jeu de mots dont l’inspiration se trouve dans un sonnet écrit par Jean Yver il y a environ 600 ans. Ce sonnet fait référence au printemps, à la renaissance et le peintre a trouvé intéressante l’idée de mettre côte à côte les deux saisons, du moins phonétiquement. 

La soirée se déroule donc entièrement en français sauf pour les interventions du présentateur. Après une brève mise en situation par M. Yver, Nadine Marais, l’autre peintre, s’installe avec lui devant la grande toile blanche sur laquelle ils doivent réaliser une création à quatre mains. 

« Ce n’est vraiment pas évident pour moi, confie M. Yver. J’ai déjà peint devant un public, mais cette expérience est quelque chose qui m’est entièrement inconnu. De plus, j’ai rencontré Nadine pendant un court moment un peu plus tôt et nous n’avons pas vraiment déterminé de ligne ou de thématique commune. Ce sera donc une espèce de conversation silencieuse au terme de laquelle nous verrons bien si nous avons un résultat probant. Au moins, on va essayer de s’amuser ». 

Avec quelques minutes de retard sur l’horaire prévu, la musique a débuté et les premiers traits au pinceau sont apparus. À la fin du premier mouvement musical, un spectateur se lève et lit un poème dont la thématique générale est, évidemment, le printemps. Le scénario se répète pendant environ 90 minutes devant une assemblée silencieuse et extrêmement attentive à ce qui se déroule sur la toile. La dernière note jouée, les deux artistes déposent leurs pinceaux et saluent l’auditoire dont les applaudissements nourris témoignent du plaisir que tout le monde a pris. 

L’œuvre réalisée tout comme la quarantaine d’œuvres affichées sur les murs étaient mises en vente par encan silencieux pendant que les gens présents profitaient du buffet tout en discutant sur le sens de l’œuvre qui regroupe plusieurs éléments qui font dire à quelques-uns qu’il s’agit d’une représentation de la conception du monde, à d’autres qu’elle met en présence une vision européenne versus une approche plus nord-américaine, etc.

C’était la première fois qu’un tel événement se déroulait dans la communauté francophone de Windsor et, devant le succès obtenu, il ne faudrait pas se surprendre que d’autres initiatives artistiques soient proposées à l’avenir. 

Photo:  L’oeuvre réalisée par Nadine Marais et Étienne Yver a été mise en vente par encan silencieux.