Il n’aura pas fallu longtemps aux villes de Windsor et de Tecumseh, visées par une poursuite en recours collectif qui pourrait leur coûter quelque 80 millions $, pour riposter en lançant une campagne demandant aux organismes inscrits aux documents de la poursuite de se retirer. Elles ont invoqué les conséquences qu’un jugement en faveur des demandeurs pourrait avoir pour les contribuables des deux municipalités. 

Quasiment au même titre que l’automobile, le bingo fait partie de l’ADN de Windsor et de la région. Il y a encore une dizaine d’années, pas moins de 13 sites offraient aux intéressés la possibilité de jouer quelques parties, et ce, 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Peu importe l’heure du jour ou de la nuit, les stationnements autour de ces édifices étaient pleins. 

Non seulement les joueurs avaient de bonnes chances de gagner mais, de plus, les organismes qui organisaient les sessions de bingo pouvaient amasser des sommes intéressantes qui étaient redistribuées dans la communauté puisque les revenus tirés des bingos ne pouvaient servir à financer le fonctionnement des organisations. 

C’est ainsi que des organismes francophones tels que le Centre communautaire Windsor-Essex-Kent, le Club Alouette, l’ACFO, le Club Richelieu Windsor et autres pouvaient appuyer des causes ou des activités qui bénéficiaient à tout le monde. 

Depuis le début des années 2000, les choses ont changé notamment en raison de changements organisationnels, de la conjoncture économique, des contraintes à la frontière et des nouvelles règles concernant le tabac. Les organisations telle Place Concorde disposent de moins d’occasions d’organiser des sessions. « Nous avions l’habitude de demander 400 permis par an, mentionne Didier Marotte, directeur général du Centre francophone de Windsor-Essex-Kent. Aujourd’hui, nous en demandons une quarantaine. » Et cette situation prévaut pour tous les organismes. 

En 2007, l’Association pour la sclérose latérale amyotrophique intente une poursuite contre Windsor et Tecumseh en déclarant que les villes ne peuvent tirer de profit de la vente des permis pour la tenue de bingos ou d’autres activités de financement incluant des jeux. 

La Cour supérieure de l’Ontario a accepté la demande de recours collectif. À partir de ce moment, toutes les organisations de bienfaisance qui ont payé pour obtenir des permis ont été, par défaut, incluses dans le recours collectif. 

Le 16 janvier dernier, après avoir obtenu l’autorisation de le faire, les villes de Windsor et Tecumseh ont lancé une campagne invitant les organismes de bienfaisance à se retirer de la poursuite. Leur argument principal voulant que si le recours devait s’avérer gagnant, la facture de quelque 80 millions $ (7 millions pour Tecumseh et le reste pour Windsor) devra être refilée aux contribuables. Les procureurs de la poursuite n’ont pas tardé à répliquer en disant que cela allait dresser les organisations les unes contre les autres et ont demandé à la Cour d’arrêter la campagne qui devrait se dérouler jusqu’à la mi-mai.

Du côté des organisations francophones, les avis sont partagés, mais le sujet sera soumis aux différents conseils d’administration dans les semaines à venir.